Libéral

Pays-Bas

La pleine liberté de conscience et de religion est reconnue par la constitution révisée en 1983 (art. 6). Les sept articles faisant référence aux religions du pays ont été supprimés. L’Etat finance toutes les religions depuis 1848, date où le calvinisme perd son statut de religion d’Etat. Pluriconfessionnelle, la société néerlandaise a évolué vers une logique de sécularisation. De culture protestante, le Pays-Bas a opéré une séparation progressive de l’Eglise et de l’Etat. Les édifices religieux sont de statut privé mais des fonds publics viennent largement en aide aux structures confessionnelles d’éducation. Le catéchisme est enseigné dans les écoles publiques par les professeurs même s’il existe l’alternative des cours d’humanisme séculier. Certaines universités d’Etat acceptent l’enseignement de la théologie.

Code pénal néerlandais : II, Titre V – Ordre public : Perturbation d’une assemblée religieuse

« Art. 146. – Celui qui perturbe intentionnellement en provoquant du désordre ou en faisant du bruit soit une réunion publique autorisée à des fins de pratiques religieuse ou de convictions philosophiques, soit une cérémonie autorisée religieuse ou philosophique ou mortuaire, sera puni d’une peine de prison d’au plus de deux mois ou d’une amende de deuxième catégories. »

Loi du 3 mars 1991 modifiée par la loi du 20 avril 1988.

L’empêchement du déroulement normal d’une cérémonie religieuse ne concerne pas les conversations ou les rires mais plutôt le fait de parler d’une voix forte qui « fait du bruit ». Il faut entendre blasphème comme « injure méprisante vis-à-vis de Dieu » dans l’article 147.

« Art. 147. – Sera puni d’une peine de prison d’au plus de trois mois ou d’une amende de deuxième catégorie :

1° celui qui publiquement, verbalement ou par écrit ou par image, exprime de manière blessante des blasphèmes contre des sentiments religieux ;

2° celui qui se moque d’un ministre du culte dans l’exercice autorisé de son ministère ;

3° celui qui insulte les objets consacrés à un culte, pendant et là où l’exercice de ce culte est autorisé. »

Loi du 3 mars 1881 modifiée par la loi du 4 novembre 1932 et du 4 mai 1954.

Le concept de « blasphème » s’entend dans le sens d’une intention de rabaisser, de ridiculiser la Bible, la parole de Dieu, les actions du Christ ou de s’attaquer à la sainte Trinité.

Diffusion d’écrits ou d’images

« Art. 147a. – 1. Celui qui diffuse, expose publiquement ou promeut, ou possède en réserve à des fins de publication, d’exposition publique ou de promotion, des écrits ou des images où apparaissent des expressions blasphématoires blessantes pour les sentiments religieux, et pour autant qu’il sache ou a de sérieuses raisons de supposer que de telles expressions apparaissent dans l’écrit ou l’image, sera puni d’au plus de deux mois de prison ou d’une amende de deuxième catégorie.

– 2. Sera puni de la même peine celui qui, ayant les mêmes connaissances ou les mêmes raisons de supposition, porte le contenu d’un tel écrit à l’audience publique.

– 3. Au cas où le coupable commet l’un des délits décrits dans cet article dans [l’exercice de] sa profession et que, lors de l’accomplissement du délit, il ne s’est pas encore écoulé deux ans depuis une condamnation antérieure du coupable du fait qu’un de ces délits est devenu irrévocable, il peut être déchu [du droit] de l’exercice de cette profession. »

Ajouté à la loi du 19 juillet 1934 et modifié par la loi du 4 mai 1954.

Titre II – Transgressions concernant l’ordre public

« Art. 429 bis. – Celui qui dispose ou maintient placé dans un endroit visible de la voie publique des mots ou des représentations qui, en tant que blasphèmes, sont blessant pour les sentiments religieux sera puni de détention d’au maximum un mois ou d’une amende de deuxième catégorie. »

Inséré dans la loi du 4 novembre 1932.

En 1966, le sulfureux romancier Gerard Reve, dans un passage de son livre Nader Tot U, avait représenté Dieu, sous les traits d’un âne qu’il doit « longuement posséder trois fois de suite dans son ouverture secrète ». L’écrivain fut acquitté lors d’un procès pour blasphème.

Le 2 novembre 2004 le réalisateur Théo Van Gogh est assassiné à Amsterdam après la diffusion à la télévision néerlandaise de son film sur l’islam Submission. Ce court-métrage a été écrit par Ayaan Hirsi Ali, une jeune députée libérale d’origine somalienne. Il dénonce le sort injuste réservé aux femmes par l’islam, la maltraitance légitimée par le Coran.

Un appel au djihad (la guerre sainte) est retrouvé sur le corps du cinéaste. La lettre contient également des menaces à l’encontre d’Ayaan Hirsi Ali.

Mohammed Bouyeri, l’assassin du cinéaste, est un islamiste maroco-néerlandais. Il a affirmé, pendant son procès, avoir agi « au nom de sa religion », « en accord avec sa foi » et a refusé d’être défendu. Il fut condamné à la réclusion à perpétuité par le tribunal d’Amsterdam le 26 juillet 2005. On découvre à l’occasion que l’imam Fawaz de la mosquée as-Sunnah de La Haye avait qualifié Van Gogh, dans un sermon qui a été enregistré, de « salaud criminel » et priait Allah de lui inculquer une maladie incurable…

La suite du film de Van Gogh ne sera pas interdite malgré la requête de musulmans qui exigeaient la censure à la fois de l’œuvre et des propos de la députée Ayaan Hirsi Ali (réalisatrice du film). Cependant, les déboires de celle-ci ne faisaient que commencer. Elle fut d’abord contrainte de déménager après une plainte de ses voisins qui craignaient un attentat dans leur immeuble. Elle dû ensuite renoncer à son mandat parlementaire ainsi qu’à sa nationalité néerlandaise ayant avoué qu’elle avait menti sur son nom, sa date de naissance et sur son statut réel de réfugiée.

En septembre 2006, de jeunes protestants orthodoxes ont demandé en vain l’interdiction du concert de Madonna où elle dénonce la politique de l’Eglise catholique en matière de sida en se mettant en scène crucifiée.

Sooreh Hera est une artiste iranienne réfugiée aux Pays-Bas. Son travail est exposé au Musée municipal de La Haye mais le 30 novembre, le directeur du Musée demande à l’artiste de retirer certaines pièces blasphématoires. Les photos en question représentent un couple d’homosexuels iraniens masqués par le visage de Mahomet ou de son gendre Ali. La jeune femme retire toutes ses œuvres après avoir protesté contre cette censure.