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Angleterre

L’Eglise anglicane est établie en Angleterre mais pas dans le reste de la Grande- Bretagne (Ecosse, pays de Galles, Irlande du Nord). Une logique de sécularisation a cependant transformé progressivement la tradition anglicane par un évidement de son statut privilégié et spécifique au cours du XXe siècle. Contre les conservatismes politiques, toutes les confessions chrétiennes ont pu, peu à peu, obtenir une reconnaissance. Par ailleurs, le Parlement a pour compétence l’organisation de l’Eglise et le contrôle du culte.

A l’origine, la définition du blasphème concernait toute dénégation publique des doctrines fondamentales du christianisme. Au XVIIIe et XIXe siècles, avec l’expansion et la diffusion de la raison, on assiste à une évolution de la définition de cette infraction. A la fin du XIXe siècle,  la définition de l’infraction était plus restrictive (arrêt de 1883) et consistait seulement dans les blasphèmes de nature à blesser sérieusement les sensibilités religieuses des chrétiens.

La définition du blasphème a ainsi connu une lente évolution mais l’objectif est resté le même : protéger les religions chrétiennes.

La difficulté pour parler de la situation juridique du blasphème en Angleterre vient du fait qu’il n’y a pas de code pénal. Chacun a le droit de déclencher une private prosecution, une poursuite privée. Ce droit, qui ne se limite pas aux victimes mais s’étend à tout le monde, est capital en Angleterre (il n’existe pas en Ecosse par exemple). Pour commencer une poursuite à l’encontre d’un propos blasphématoire, il faut obtenir la permission d’un juge (loi de 1888). Trois affaires ont marqué, dans la période récente, la législation anglaise : affaires Gay News, Wingrove et Rushdie.

Au XXe siècle, les poursuites pour blasphème sont rares mais retentissantes. On peut citer, en particulier, l’affaire Gay News (hebdomadaire destiné aux homosexuels) qui fut la première affaire depuis 1922. En 1976, Mary Whitehouse obtint la permission d’un juge pour engager des poursuites contre un poème publié dans ce journal et jugé, par la plaignante, obscène et immoral. Le journal fut condamné à une amende et le rédacteur, Denis Lemon, à une peine d’emprisonnement avec sursis. En appel, la House of Lords (la Cour suprême) conclue que « nulle intention d’offenser n’est nécessaire, pas plus que la négligence à cet égard » et que « pour constituer l’infraction de blasphème, il n’est pas nécessaire que la publication entraîne un risque pour l’ordre public ». La Commission Européenne jugea non recevable la requête présentée par les défenseurs à la Cour européenne des droits de l’homme. L’affaire Gay News provoqua un grand débat autour du maintien ou de l’abolition de l’infraction du blasphème car la décision de la Cour suprême, dans cette affaire, lui a donnée une forme juridique.

Dans cette affaire (arrêt R. v. Lemon (1979), plus connu sous le nom de Gay News), le blasphème est défini comme comportant « un quelconque élément de mépris, d’injure, de grossièreté ou de ridicule à l’égard de Dieu, de Jésus-Christ ou de la Bible (…) ». N’est pas blasphématoire le fait de prononcer ou de publier des opinions hostiles à la religion chrétienne, dès lors que la publication est « libellée en un langage décent et mesuré ». L’important n’est pas le contenu, mais sa présentation, c’est-à-dire plus précisément « le ton, le style et l’esprit » qui la caractérisent.

En effet, dans l’affaire Whitehouse v. Gay News Ltd and Lemon (Appeal Cases 1979, p. 665), qui concernait le droit sur le blasphème en Angleterre, Lord Scarman a déclaré que les règles contemporaines en matière de blasphème sont formulées au paragraphe 214 de l’ouvrage de Stephen, Digest of the Criminal Law (9e édition, 1950). L’auteur y écrit :

« Une publication revêt un caractère blasphématoire lorsqu’elle contient un quelconque élément de mépris, d’injure, de grossièreté ou de ridicule à l’égard de Dieu, de Jésus-Christ, de la Bible ou du rituel de l’Eglise d’Angleterre telle qu’établie par la loi.  N’est pas blasphématoire le fait de prononcer ou de publier des opinions hostiles à la religion chrétienne, ou de nier l’existence de Dieu, dès lors que la publication est libellée en un langage décent et mesuré. Le critère d’appréciation est la manière dont les doctrines sont défendues, et non leur contenu en soi. »

Le blasphème et la diffamation blasphématoire sont donc des infractions de common law dont les auteurs peuvent être poursuivis en justice et encourent une peine d’amende ou d’emprisonnement.

C’est une affaire également très importante et qui mérite que l’on s’y attarde dans la mesure ou elle provoque un effort d’éclaircissement sur le délit de blasphème et fait l’objet d’un arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

Nigel Wingrove a écrit le scénario et réalisé un film intitulé Visions of Ecstasy (Visions d’extase). L’action du film est centrée sur une jeune femme habillée en religieuse, censée représenter sainte Thérèse.

Nigel Wingrove soumit son film à l’Office des visas afin de pouvoir, en toute légalité, le vendre, le louer ou le diffuser auprès du grand public. La commission chargée de la classification officielle des films et des vidéos peut invoquer l’infraction de blasphème pour censurer une œuvre cinématographique. Le 18 septembre 1989, l’Office rejeta la demande de visa en ces termes :

« Le film vidéo que vous nous avez soumis mêle l’extase religieuse à la passion charnelle.  Si ce thème peut revêtir un intérêt légitime pour l’artiste, il relève toutefois du droit sur le blasphème dès lors que sa présentation risque d’offenser autrui par la manière inacceptable dont est traité un sujet sacré.  Considérant que le corps meurtri du Christ crucifié est présenté exclusivement comme l’objet des désirs érotiques de sainte Thérèse et, à certains moments, comme un participant à ses désirs, et que la signification des images n’est nullement approfondie – ce qui limite le film à une expérience érotique proposée aux spectateurs -, l’Office des visas et ses conseillers juridiques estiment qu’un jury raisonnable et convenablement instruit des points de droit conclurait que cette oeuvre enfreint le droit pénal sur le blasphème. »

L’Office des visas explique sa décision de la manière suivante :

« Après avoir consulté un éminent avocat, l’Office des visas a conclu que le film vidéo en question enfreint le droit pénal sur le blasphème, et qu’un jury raisonnable et convenablement instruit des points de droit parviendrait à la même conclusion. Il considère – et a été avisé – qu’en Grande-Bretagne, il y a délit de blasphème lorsqu’un film vidéo traite un sujet à caractère religieux (notamment Dieu, Jésus-Christ ou la Bible) d’une manière qui est de nature à choquer (dans le sens de « susceptible de », et non de « conçue pour » choquer) quiconque connaît, apprécie ou fait siennes l’histoire et la morale chrétiennes, en raison de l’élément de mépris, d’injure, d’insulte, de grossièreté ou de ridicule que révèlent le ton, le style et l’esprit caractérisant la présentation du sujet. »

La commission de recours saisie par M. Wingrove rejeta sa demande le 23 décembre 1989, contournant la problématique de l’œuvre artistique :

« Par ailleurs, il y a lieu de répondre, ne fût-ce que brièvement, à un autre argument présenté au nom du demandeur, selon lequel le délit de blasphème ne peut porter que sur des paroles écrites ou prononcées, et donc qu’un tribunal ne saurait décider qu’un film cinématographique ou une oeuvre vidéo, de même sans doute qu’une image télévisée, puisse donner lieu à poursuites de ce chef.  Nous nous contenterons de répondre que l’argument est à notre sens trop pauvre pour être retenu par l’Office des visas ou le collège de la commission de recours au moment de prendre leur décision. »

A l’occasion de cette affaire, le droit sur le blasphème est défini de la manière suivante :

« Le blasphème et la diffamation blasphématoire sont des infractions de common law dont les auteurs peuvent être poursuivis en justice et encourent une peine d’amende ou d’emprisonnement.  Alors que le blasphème a trait à des déclarations verbales, la diffamation blasphématoire consiste à publier d’une manière ou d’une autre un message à caractère blasphématoire. La diffamation suppose une publication sous une forme permanente, qui peut consister en des images filmées. »

La Cour européenne des Droits de l’Homme ayant été saisie, elle doit se prononcer sur l’application du droit anglais :

« Sur la teneur du droit lui-même, la Cour relève que le droit anglais sur le blasphème n’interdit pas l’expression, sous quelque forme que ce soit, d’idées hostiles à la religion chrétienne. On ne saurait dire non plus que des opinions offensantes pour des chrétiens tombent nécessairement sous le coup de ce droit.  Comme les juridictions anglaises l’ont indiqué, c’est plutôt la manière de défendre les idées que leur contenu en soi que le droit cherche à contrôler. L’ampleur de l’insulte aux sentiments religieux doit être importante, comme le montre bien l’emploi par les tribunaux des mots « mépris », « injure », « grossièreté », « ridicule », pour désigner un article de caractère suffisamment offensant. »

Cependant, la Cour n’a pas souhaité dénoncer la discrimination qu’établie le droit anglais :

« Il est exact que le droit anglais sur le blasphème ne concerne que la foi chrétienne. La Divisional Court a d’ailleurs reconnu l’anomalie de cette situation dans une société multiconfessionnelle, avec son arrêt R. v. Chief Metropolitan Stipendiary Magistrate, ex parte Choudhury.  Il n’appartient cependant pas à la Cour de se prononcer in abstracto sur la compatibilité du droit interne avec la Convention. Le degré de protection assuré par le droit anglais aux autres croyances n’est pas en jeu devant la Cour, laquelle doit se borner à examiner l’affaire dont elle est saisie. »

Elle marque au contraire son souci de ne pas remettre en cause le droit anglais :

« Il ne semble pas y avoir incertitude en général ni désaccord entre les comparants sur la définition en droit anglais du délit de blasphème tel que la Chambre des lords l’a exprimée dans l’affaire Whitehouse v. Gay News Ltd and Lemon. La Cour, qui a visionné le film, est convaincue que le requérant aurait pu raisonnablement prévoir, en s’entourant de conseils éclairés, que son film, notamment les scènes où figure le Christ en croix, pouvait tomber sous le coup de la loi sur le blasphème. »

La Cour européenne des Droits de l’Homme conclue en se contredisant elle-même :

« La Cour reconnaît que le délit de blasphème ne saurait, de par sa nature même, se prêter à une définition juridique précise.»

Soulignant ainsi involontairement son impuissance, elle considère que les lois sur le blasphème entrent dans le cadre de ce que les Etats peuvent légitimement juger « nécessaire dans une société démocratique ». A défaut d’avoir une position européenne à défendre, elle légitime clairement la loi anglaise sur les délits de blasphème :

« La Commission estime que le droit anglais sur le blasphème tend à éliminer les comportements dirigés contre les objets de vénération religieuse qui sont de nature à causer une indignation justifiée chez les chrétiens. Il en découle qu’en l’espèce, l’application de ces règles visait donc à protéger le droit pour les citoyens de ne pas être insultés dans leurs sentiments religieux. »

« Le fait incontesté que le droit sur le blasphème ne traite pas à égalité les différentes religions professées au Royaume-Uni n’enlève rien à la légitimité du but poursuivi dans le présent contexte. »

Mais le rôle de l’instance européenne reste, en ce domaine, volontairement très flou :

« Bien entendu, cela n’exclut pas au bout du compte un contrôle européen, d’autant plus nécessaire que la notion de blasphème est large et évolutive et que, sous couvert de mesures contre des articles réputés blasphématoires, se cache le risque de porter une atteinte arbitraire ou excessive à la liberté d’expression.  Le champ d’application du délit de blasphème et les garanties prévues par la législation revêtent à cet égard une importance spéciale. En outre, le fait que la présente cause comporte une restriction préalable appelle un examen particulier de la part de la Cour. »

La Cour européenne des Droits de l’Homme, par son arrêt en date du 22 octobre 1996, confirme donc que le délit de blasphème ne vise pas les autres religions. Seule la religion chrétienne a se privilège.

L’affaire Salman Rushdie éclate avec la publication de son roman Les Versets sataniques. Elle aura très vite un retentissement international. Une partie de la communauté musulmane s’est sentie offensée et les extrémistes islamiques se sont emparés de l’occasion pour persécuter l’écrivain. Le 9 avril 1990, un jugement de la High Court, donne un nouvel éclairage en matière de blasphème. M Abdul Hussain Choudhury, dirigeant une association musulmane, saisi cette court contre Salman Rushdie et son éditeur Viking Penguin pour blasphème et diffamation séditieuse. La High Court doit alors se prononcer sur l’application de la loi sur le blasphème à des religions autres que la christianisme. Si la Cour reconnaît bien le caractère blasphématoire des Versets sataniques, elle considère que la loi ne protège que les religions chrétiennes et que son application ne peut être étendue à toutes les religions au risque d’entraver la liberté d’expression… Le texte du jugement témoigne d’un embarras évident : comment refuser à d’autres religions la protection de la loi ? Elle laisse entendre que si la liberté de religion est assurée, elle n’est pas à l’abri de limitations ; que la liberté d’expression est sujette à des exceptions ; que la discrimination dans l’exercice de la liberté de religion a une justification objective et raisonnable ; que l’extension de la loi encouragerait l’intolérance et l’esprit de division ; que cette extension supposerait l’intervention d’experts pour définir une religion… On comprend que, dans le contexte de l’affaire Rushdie, il était impensable de prononcer une condamnation sans prendre le risque de légitimer l’appel au meurtre de l’écrivain par l’Iran. Mais la décision de la Cours revient de fait à affirmer que le blasphème à l’égard d’une autre religion que la religion chrétienne n’est pas punissable et confirme à nouveau clairement une discrimination.

Le droit sur le blasphème ne protège donc que les adeptes de la religion chrétienne et, plus particulièrement, ceux de l’Eglise établie d’Angleterre. La Divisional Court l’a confirmé en 1991. Se prononçant sur une demande de contrôle juridictionnel du refus d’un magistrat d’assigner en référé pour blasphème Salman Rushdie et les éditeurs des Versets sataniques, Lord Watkins déclara :

« Il ne fait aucun doute pour nous que la loi dans son état actuel ne s’étend pas aux religions autres que le christianisme (…)

Nous estimons juste de dire que si nous était ouverte la faculté d’étendre la loi à des religions autres que le christianisme, nous devrions nous en abstenir. Les considérations d’intérêt général sont en effet très difficiles et fort complexes.  Il serait pratiquement impossible aux juges de circonscrire le délit dans des limites suffisamment claires et les autres problèmes en jeu sont colossaux. » (R. v. Chief Metropolitan Stipendiary Magistrate, ex parte Choudhury, All England Law Reports 1991, vol. 1, p. 318)

Le 4 juillet 1989, le ministre adjoint de l’Intérieur, M. John Patten, adressa une lettre à un certain nombre de personnalités musulmanes britanniques, dans laquelle il écrivait notamment :

« De nombreux musulmans ont soutenu qu’il faudrait modifier le droit sur le blasphème pour mettre des livres tels que [Les Versets sataniques] hors du champ de ce qui est légalement acceptable.  Nous avons soigneusement pesé leurs arguments et sommes parvenus à la conclusion que, pour toute une série de motifs, il ne serait pas sage de modifier le droit sur le blasphème, ne serait-ce qu’en raison de l’absence de consensus sur le point de savoir si l’on devait réformer ou abroger ce droit. (…)

(…) modifier le droit pourrait entraîner un foisonnement de litiges qui envenimerait les relations inter-confessionnelles.

Je pense que vous êtes conscients des divisions et des dommages que pourrait engendrer un tel contentieux et du caractère inapproprié de nos mécanismes juridiques pour traiter des questions de foi et de croyance individuelles.  En fait, la foi chrétienne ne s’appuie plus sur ce droit, préférant admettre que la puissance de ses convictions propres constitue la meilleure armure contre railleurs et blasphémateurs. »

Au fond, ces propos tendent à montrer que l’infraction du blasphème qui vise à faire interdire des livres et à en empêcher leur lecture fait le jeu des intégristes, qu’ils soient chrétiens ou musulmans. Le retentissement international de l’affaire Rushdie mérite que l’on s’attarde à la chronologie des événements afin de bien en mesurer l’ampleur.

Chronologie de l’affaire Rushdie

14 janvier 1989 : 1500 personnes se rassemblent devant la mairie de Bradford en Angleterre pour procéder à un autodafé des Versets sataniques de Salman Rushdie.

12 février 1989 : La publication aux Etats-Unis des Versets sataniques provoque une sanglante manifestation contre un centre culturel américain au Pakistan. Bilan : 5 morts et 40 blessés.

14 février 1989 : L’imam Khomeiny d’Iran ordonne l’exécution rapide de l’auteur qui, selon lui, « offense l’islam, le prophète et le Coran ». L’éditeur Viking (groupe Penguin) est aussi visé par cette condamnation. « Je demande à tous les musulmans du monde d’exécuter rapidement l’auteur et les éditeurs du livre n’importe où dans le monde (…) afin que personne n’ose plus, dans l’avenir, offenser l’islam ».

15 février 1989 : Les Editions Viking décident de ne pas retirer de la vente l’ouvrage de Salman Rushdie. En revanche, les Editions Christian Bourgois renoncent à le publier en français.

18 février 1989 : Selon le recteur de la Mosquée de Paris, Cheikh Abbas, « la liberté de l’écrivain passe par celle du croyant » ; « Toute atteinte à l’honneur et à la dignité d’une personne est un blasphème qu’il appartient au juge de sanctionner ».

19 février 1989 : En Espagne, les éditeurs reporte la publication du livre. Seules les éditions Mondadori, en Italie, ont maintenu leur décision de publier malgré les menaces de l’Iran. En France, le quotidien Le Monde publie les passages qui choquent les musulmans.

3 mars 1989 : Le livre de Salman Rushdie est réédité à Londres.

4 mars 1989 : Dans l’Osservatore Romano, quotidien officiel du Saint Siège, le Vatican critique « la part d’irrévérence et de blasphème » contenue dans le livre de l’écrivain britannique

5 mars 1989 : Mme Thatcher juge le livre « profondément offensant » pour l’islam ce qui provoque une vive polémique en Grande-Bretagne.

20 mars 1989 : Le président tunisien Ben Ali estime que « en appeler au meurtre n’est pas acceptable ».

22 avril 1989 : Une édition pirate des Versets sataniques est saisie à Montpellier sur la demande de l’éditeur Christian Bourgois, propriétaire exclusif en France des droits de publication.

28 avril 1989 : Plusieurs diplomates britanniques reçoivent des menaces de mort. Les défenseurs de la pureté islamique, une organisation jusqu’ici inconnue, envoient une liste de diplomates « qui seraient assassinés dans les prochaines heures ».

10 mai 1989 : Jean-Edern Hallier publie une nouvelle version pirate en France dans un numéro spécial de son hebdomadaire l’Idiot international.

27 mai 1989 : De violents affrontements ont lieu devant le Parlement à Londres lors d’une manifestation musulmane contre Salman Rushdie qui rassemblait plus de 20 000 personnes.

19 juillet 1989 : Les Versets sataniques sont publiés en France aux Editions Christian Bourgois.

21 juillet 1989 : Peu de libraires, en France, osent mettre en rayon le livre. Parmi les « grands », seule la FNAC s’y engage.

31 juillet 1989 : La BBC diffuse, à propos de l’affaire Rushdie, une pièce sur l’intolérance religieuse, qui fait polémique. Le Banquet des blasphémateurs met en scène un groupe de libres penseurs accusés de blasphème.

13 septembre 1989 : Une bombe explose devant une librairie Penguin à York. Trois autres attentats sont déjoués.

21 septembre 1989 : Les éditeurs allemands décident de repousser la publication du livre et donc de le retirer de la Foire du livre de Francfort en raison des menaces reçues.

14 février 1990 : Le livre est publié au Japon.

9 avril 1990 : La Haute Cour de Londres refuse de condamner Salman Rushdie et son éditeur pour blasphème comme le demandait le Front d’action des musulmans britanniques.

24 décembre 1990 : Salman Rushdie renie ses « blasphèmes » en signant une déclaration écrite en présence du secrétaire d’Etat égyptien aux biens religieux, Mohammed Ali Maghoub.

9 mai 1991 : Salman Rushdie se convertit à l’islam mais refuse de retirer son livre de la vente.

3 juillet 1991 : Alberto Capriolo, le traducteur italien des Versets sataniques est blessé d’un coups de couteau à Milan.

12 juillet 1991 : Hitoshi Igarashi, le traducteur japonais des Versets sataniques est assassiné.

14 février 1992 : Les Versets sataniques sont édités en livre de poche en Grande-Bretagne.

11 octobre 1993 : William Nygaard, l’éditeur norvégien de Salman Rushdie est grièvement blessé par trois balles dans un attentat.

17 janvier 1994 : Un hebdomadaire égyptien, Rose al-Youssef, publie des extraits du livre.

12 janvier 1995 : La publication à Prague des Versets sataniques provoque une psychose. Le livre est distribué sous le manteau.

21 décembre 1997 : Le nouveau ministre iranien de la culture, Ataollah Mohadjarani, affirme que la fatwa (décret religieux) visant Salman Rushdie ne sera pas mise à exécution.

24 avril 1998 : Les Versets sataniques sont publiés en poche aux Etats-Unis.

12 février 2005 : Les Gardiens de la Révolution indique que Salman Rushdie est toujours menacé par la fatwa de l’ayatollah Khomeyni et que « le jour viendra pour les musulmans de châtier l’apostat Rushdie pour avoir transgressé le saint Coran et le prophète Mahomet ».

16 juin 2007 : Anoblissement de Salman Rushdie par la reine d’Angleterre Elizabeth II. Considérant cette décoration comme une insulte envers les sociétés islamiques, Al-Qaida promet « une réponse ».

18 juin 2007 : Les autorités pakistanaises exigent le retrait de cette décoration.

19 juin 2007 : A Karachi (Pakistan), des manifestations antibritanniques font suite à la décision d’élever l’écrivain au rang de chevalier.

La Chambre des Lords rejetait par 240 voix contre 141, le 10 décembre 2001, une proposition de loi qui aggravait la législation sur le blasphème en rendant illégal tout « propos haineux » à l’encontre des religions. L’humoriste Rowan Atkinson (« Mr Bean ») avait pris la tête des opposants à la loi à travers une lettre publiée le 17 octobre dans le Times de Londres et l’organisation d’une manifestation de protestation.

Le 18 décembre 2004, 400 sikhs saccagent l’entrée du théâtre de Birmingham en signe de protestation contre la pièce intitulé Behzti (Déshonneur) écrite par Gurpreet Kaur Bhatti et dans laquelle sont mis en scène un viol et un meurtre dans un temple sikh. Toutes les représentations furent supprimées et l’auteure menacée. Un autre directeur de théâtre qui proposait de reprendre la pièce fut également menacé de mort.

La diffusion de la comédie musicale Jerry Springer The Opera par la BBC le 8 janvier 2005 a suscité l’indignation. Le niveau record de 50 000 lettres et coups de téléphones ont été atteints ainsi que le chiffre record de 7 000 plaintes devant l’autorité de régulation de l’audiovisuel britannique pour grossièreté et blasphème. A titre de comparaison, en 1995, La Dernière Tentation du Christ de Martin Scorcese avait provoqué 1 554 plaintes. Le spectacle en question est consacré à un célèbre animateur de télévision. Il présente Jésus en couches-culottes qui caresse Eve et se décrit lui-même comme « un peu homo ».

L’association britannique Hindu Human Rights regroupant des hindous a fait plier le marchand de chaussure français Minelli qui a renoncé à la commercialisation d’escarpins et a présenté ses excuses. Les produits en cause comportaient l’effigie du dieu Rama dessinée sur l’empeigne. Minelli aurait même renvoyé « toutes les chaussures restantes afin qu’elles soient détruites selon les traditions et sensibilités hindoues » (Libération, 1er septembre 2005).

Fin septembre 2005, la Tate Gallery, l’un des plus importants musées de Londres, a décidé de retirer d’une exposition consacrée à John Latham une œuvre intitulée God is Great (« Dieu est grand »). Constituée d’exemplaires de la Bible, du Talmud et du Coran coupés, gelés et enchâssés dans une épaisse vitre verticale, l’œuvre à été jugé blasphématoire par le directeur du musée.

Après la crise internationale provoquée par la parution dans le quotidien danois Jyllands-Posten, le 30 septembre 2005, des caricatures de Mahomet, les journaux en Angleterre ont décidé de ne pas publier ces dessins…